Mesdames et Messieurs les députés,
En tant que simple citoyen, je tenais à vous alerter sur le fait que la loi sur « l’aide active à mourir » ne relève ni de la compassion, ni de la fraternité, ni de la liberté, ni de la remédiation à la souffrance et au désespoir. C’est même tout le contraire.
Pour tenter de vous en convaincre, je vous propose cette analogie toute simple :
Imaginez qu’une loi sur « l’aide active à mourir politiquement » soit proposée. Une loi qui permettrait de précipiter activement la chute d’un élu qui souhaiterait en finir avec la vie politique. Non pas en l’aidant à se reconvertir, mais bien en l’achevant politiquement (par exemple, en montant de toutes pièces une affaire de corruption ou de mœurs, que les médias seraient tenus de relayer, en guise d’injection létale.).
Cette loi vous paraîtrait-elle abjecte ? De mauvais goût ? Inconvenante ? Irrespectueuse ? Ce serait bien normal, et ce serait bon signe. Cela signifierait simplement que vous êtes conscients de la grandeur de votre tâche, et que vous êtes attachés à la valeur, à la dignité, à la noblesse de la vie politique, qui dépasse votre propre personne.
Cette loi vous paraîtrait-elle dangereuse ? Vous sentiriez-vous plus ou moins menacé par elle, même si vous n’êtes pas concerné a priori ? Vous auriez bien raison. Il n’est pas difficile d’imaginer toutes les dérives possibles qu’entraînerait une telle loi, et les menaces qu’elle ferait rapidement peser sur les élus les plus vulnérables.
Cette loi serait-elle, selon vous, une loi de fraternité ? Une loi de compassion ? L’élu qui ne parviendrait plus à supporter la pression et les moqueries des médias, la cruauté des opposants, le poids écrasant de ses responsabilités, trouverait-t-il dans cette loi réconfort, fraternité, compassion à son égard ? Ne serait-ce pas tout le contraire ? La compassion ne consisterait-elle pas plutôt dans une écoute attentive et bienveillante, et dans le fait de pallier autant que faire se peut les difficultés rencontrées ?
Cette loi serait-elle, selon vous, une loi de liberté ? Pensez-vous qu’un élu qui demanderait de faire appliquer cette loi à lui-même le ferait en toute liberté ? Ne serait-il pas au contraire entièrement contraint par les difficultés qu’il rencontre, parce qu’il ne voit plus aucun autre choix et que sa volonté capitule ? Est-ce faire usage de sa liberté que de prendre une telle décision dans de telles conditions ? Ne serait-ce pas plutôt en étant soutenu, dans un accompagnement aussi humble et démuni soit-il, que sa liberté aurait des chances de pouvoir s’exprimer vraiment ?
Cette loi diminuerait-elle un tant soit peu les souffrances, le désespoir, que peut parfois occasionner la vie politique ? Non, bien sûr. Bien au contraire, en légitimant le fait de pouvoir provoquer activement la mort politique, c’est l’ensemble du corps politique qui s’en trouverait grandement fragilisé, sentant en permanence le poids de cette terrifiante épée de Damoclès au-dessus de sa tête.
Ainsi en va-t-il de la loi sur « l’aide active à mourir ». Les personnes véritablement attachées à la vie, et conscientes de sa valeur, savent que cette loi est une ignominie dont les conséquences seront dévastatrices. Soyez bien certain que ce vote sera le plus important de votre mandat.
En vous remerciant pour l’attention que vous voudrez bien accorder à cette lettre, je vous prie d’agréer, Mesdames et Messieurs les députés, l’expression de ma respectueuse considération.
Un simple citoyen.
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