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Culture : cinéma

D’un clandestin l’autre : De Birmanie au Togo en passant, entre autres, par le Vietnam ou le Liban

D’un clandestin l’autre : De Birmanie au Togo en passant, entre autres, par le Vietnam ou le Liban

Bruno de Seguins Pazzis analyse le film d’Eric Deroo, D’un clandestin l’autre. Une véritable pépite, bientôt disponible en DVD, il sera diffusé les 11,17, 23 et 28 avril sur la chaine HISTOIRE.

De Birmanie au Togo en passant, entre autres, par le Vietnam ou le Liban, Eric Deroo nous emmène à la découverte de personnages rares, excentriques et touchants comme Titus, qui visite la place Rouge grimé en Lénine, ou John, mercenaire prêt à tout pour faire un coup d’état au Surinam.

De l’illusion à la vérité historique… Eric Deroo, cinéaste et historien, réalisateur de plus d’une trentaine de documentaires et spécialisé dans l’histoire coloniale française livre un film à proprement parler étonnant. Incorrectement qualifié de documentaire historique, il s’agit bien plus d’un genre quasi inédit qu’on pourrait qualifier de documentaire d’investigation historique. Ayant bourlingué sur presque tous les continents, Eric Deroo a accumulé des notes qui pour le cinéaste qu’il est sont des « rushs », des prises de vues qu’il n’a jamais utilisés et qui constituent un carnet de souvenirs très riche de pépites.

Feuilletant ce carnet, il repasse en revue des rencontres avec des personnages hors du commun, des situations inattendues qui sont tour à tour burlesques et touchantes (Titus, le globe-trotter qui ouvre et clôture le film, Menguy Dione, le tirailleur sénégalais qui n’a jamais combattu en France), tragiques (Marcel Cocteau, mercenaire en Birmanie) quand elles ne sont pas tout simplement pathétiques (John, un mercenaire anglais qui disparaîtra au Surinam, Nguyen Huu Dang, l’ancien proche l’ancien proche d’Ho Chi Minh qui détient le brouillon de la déclaration d’indépendance du Vietnam ! Les funérailles de l’empereur Bao Daï dans un Paris sous la pluie, ou encore Dominique Pagani, éditeur de manuels scolaires en Afrique). Ces épisodes, burlesques, tragiques ou pathétiques, ils le sont en eux-mêmes, pour ce qu’ils sont, mais ils le sont d’autant plus car ils  sont présentés en perspective avec l’Histoire telle qu’elle est présentée ou connue officiellement.

Au-delà de l’émotion qu’arrive à susciter ces portraits qui sont sortis de l’anonymat, de l’oubli de l’histoire (« Qu’est-ce qu’on laisse comme traces,…pas grand-chose…» confie très lucidement le baron Richard de F., collectionneur d’uniformes de généraux) et la justice, quand ce n’est pas l’hommage,  qui leur est ainsi rendu, le cinéaste pousse le spectateur à une réflexion sur la vérité historique. Ou se situe donc la vérité ? Dans l’histoire officielle, dans l’illusion qui est la raison de vivre de certains de ces personnages ? Et cette illusion, ne révèle-t-elle pas une partie jusqu’à présent cachée de la vérité historique ?  Autant dire qu’il est impossible de rester insensible à ces vérités qui éclatent à la figure du spectateur au fur et à mesure que le cinéaste ouvre son carnet de notes au moyen d’un montage qui entrecroise avec adresse ces destins pour offrir au spectateur quelques fulgurances historiques comme celle du « gauchisme infantile » évoqué par Nguyen Huu Dang, l’ancien proche d’Ho Chi Minh pour résumer le drame de la guerre du Vietnam…ou Dominique Pagani (presque un sosie jusque dans l’élocution du grand Jacques Dufilho) faisant un lien entre certains usages africains qui n’ont rien de très différents de ceux pratiqués dans nos sociétés occidentales…

Comme un Philippe de Villiers revisite les archives de la construction européenne dans son dernier ouvrage « J’ai tiré sur le fil du mensonge », cette manière qu’a le cinéaste historien Eric Deroo de feuilleter ses archives historiques avec un non-conformisme de bon aloi et une syntaxe cinématographique très personnelle résonne comme une claque salutaire à la figure du spectateur, le forçant à l’intelligence. Un cinéma roboratif.

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1 commentaire

  1. un reportage donc à voir
    merci le SB

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