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Bioéthique

Proposition de résolution visant à transposer dans le droit français la criminalisation de la Gestation pour Autrui

Proposition de résolution visant à transposer dans le droit français la criminalisation de la Gestation pour Autrui

Fabien DI FILIPPO, député LR de la Moselle, propose de faire voter par l’Assemblée nationale une résolution pour criminaliser la GPA :

Le 23 avril 2024, le Parlement européen voté de manière définitive la révision de la Directive sur la lutte contre la traite des êtres humains, qui établit des règles minimales relatives à la définition des infractions pénales et des sanctions.

Par son vote, il a reconnu comme un crime au niveau de l’Union européenne, c’est-à-dire un crime grave et de dimension transfrontalière, le mariage forcé, l’adoption illégale et l’exploitation de la gestation pour autrui (GPA).

La Directive cible en particulier les personnes qui forcent les femmes à être mères porteuses, et indique que des sanctions s’appliqueront pour les entreprises impliquées dans cette pratique.

Les États membres disposent désormais de deux années pour mettre en oeuvre l’objectif fixé par la Directive, et peuvent choisir les moyens pour y parvenir.

Ce vote du Parlement européen constitue une avancée notable pour l’abolition de la marchandisation du corps des femmes que constitue la GPA. Le droit français doit d’urgence se conformer à cette directive européenne et définitivement empêcher que soit admis ou reconnu le fait d’acheter un enfant ou de louer le ventre d’une mère.

Cette proposition de résolution vise donc à transposer au plus vite la nouvelle directive européenne et en criminalisant la pratique de la GPA dans notre législation, afin que soient sanctionnés tous ceux qui y ont recours, en France comme à l’étranger, et en inscrivant son interdiction dans notre Constitution.

Actuellement dans notre pays, le code pénal punit de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende « la substitution volontaire, la simulation ou dissimulation ayant entraîné une atteinte à l’état civil d’un enfant », ainsi que leur tentative. Sont également réprimés la provocation à l’abandon, l’entremise en vue d’adoption et, depuis la loi bioéthique n° 94-653 du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain, « le fait de s’entremettre entre une personne ou un couple désireux d’accueillir un enfant et une femme acceptant de porter en elle cet enfant en vue de le leur remettre ».

Mais la portée de la prohibition de la GPA est réduite au territoire national, et il suffit d’aller à l’étranger pour conclure une convention de gestation pour autrui et faire régulariser cette situation en France, et ce sans aucune difficulté. En effet, la circulaire dite « Taubira », publiée le 25 janvier 2013, a encouragé les juridictions françaises compétentes à délivrer un certificat de nationalité française pour les enfants nés sous gestation pour autrui à l’étranger. Nous ne pouvons que constater l’hypocrisie de la situation, dans la mesure où cette circulaire valide l’exploitation de femmes dans d’autres pays contre rémunération, ce qui serait pourtant pénalement réprimé en France. Les arrêts du 26 juin 2014 de la Cour européenne des droits de l’Homme ont quant à eux condamné la France à régulariser l’état civil de tous les enfants nés à l’étranger par GPA.

Enfin, en 2019, l’Assemblée nationale a voté la reconnaissance de la filiation des enfants nés par GPA à l’étranger, automatisant la reconnaissance dans notre pays de la filiation d’enfants conçus à l’aide d’une mère porteuse dans un pays étranger où la gestation pour autrui (GPA) est autorisée. Que reste-t-il alors de l’article 16-7 de notre code civil, qui frappe de nullité toute convention de GPA ?

La loi française est même parfois violée sur notre territoire sans que les pouvoirs publics ne s’en inquiètent : ainsi, le salon « Désir d’enfant », au cours duquel des entreprises commercialisaient sans complexe leurs prestations de GPA, s’est tenu à Paris deux années consécutives, en toute impunité. Face aux nombreuses lignes rouges déjà franchies dans notre pays, le vote du Parlement européen en faveur d’une directive inscrivant la gestation pour autrui (GPA) parmi les crimes d’exploitation des femmes doit nous pousser à réagir fortement et à adopter des mesures efficaces au niveau national pour condamner cette pratique.

En France, le CCNE se déclare favorable à l’interdiction de la GPA au nom du respect de de l’indisponibilité du corps humain et de la personne humaine, et du refus de l’exploitation de la femme et de la réification de l’enfant.

Dans un avis du 15 juin 2017, le Comité s‘était prononcé sur les demandes sociétales de GPA, et y avait rappelé son hostilité à l’autorisation de la GPA en raison des “violences qui s’exercent sur les femmes recrutées comme gestatrices et sur les enfants qui naissent et sont objets de contrats passés entre des parties très inégales”. Dans une étude publiée le 11 juillet 2018 en vue d’éclairer les débats sur la révision de la loi de bioéthique, le Conseil d’État a lui aussi considéré que cette pratique devait rester interdite, les principes d’indisponibilité du corps humain et de l’état des personnes s’opposant à “une contractualisation de la procréation”.

Il est grand temps de mettre notre législation en cohérence avec ces prises de position, et la nouvelle Directive européenne “concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène” nous engage à le faire au plus vite et à agir avec fermeté contre l’exploitation des femmes, la marchandisation de leur corps et la vente d’enfants, qu’elles aient lieu sur notre territoire ou dans un autre pays. Faire du corps des femmes un objet de location et de l’enfant un être dont on dispose à sa guise, le choisissant selon des critères précis et brisant le lien entre lui et celle qui l’a porté, est une attitude contraire au respect de la dignité humaine qui ne doit pas être tolérée.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34-1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Considérant le vote du Parlement européen le 23 avril 2024 en faveur de la révision de la Directive concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène”, qui reconnait la GPA comme une forme de « traite d’êtres humains » et la définit comme un crime au niveau de l’Union européenne ;

Considérant l’interdiction légale de la gestation pour autrui en France ; Considérant la circulaire dite « Taubira », publiée en janvier 2013, encourageant les juridictions françaises compétentes à délivrer un certificat de nationalité française pour les enfants nés sous gestation pour autrui à l’étranger ;

Considérant les arrêts du 26 juin 2014 de la Cour européenne des droits de l’Homme (Mennesson contre France et Labassée contre France) condamnant la France à régulariser l’état civil de tous les enfants nés à l’étranger par GPA ;

Considérant que les contrats de mère porteuse contreviennent aux principes d’indisponibilité du corps humain et de non-marchandisation ;

Considérant que la GPA expose à l’exploitation les femmes du monde entier, en particulier celles qui sont plus pauvres et se trouvent dans des situations de vulnérabilité ;

Considérant que la GPA porte atteinte à l’intérêt supérieur de l’enfant et à son droit fondamental à être protégé, puisqu’elle organise l’abandon d’un enfant par la femme qui l’a porté et permet aussi aux commanditaires de refuser l’enfant s’il ne correspond pas à leurs attentes ;

Réaffirme le principe d’interdiction de la gestation pour autrui qui est d’ordre public en droit français ;

Demande la criminalisation dans notre législation de la location du ventre des femmes à des fins de procréation et de la vente d’enfant, et la condamnation de ceux qui y ont recours sur le territoire national ou dans un pays où cette pratique est légale ;

Demande que soit mis fin à la reconnaissance des actes d’état civil des enfants nés par GPA ;

Demande l’inscription dans notre Constitution de l’interdiction de la GPA, pour protéger la dignité humaine et le droit des femmes à disposer de leur corps ;

Demande que la France entreprenne toutes les démarches nécessaires, au niveau international, en vue d’obtenir l’interdiction universelle de la gestation pour autrui.

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7 commentaires

  1. Bravo, il faut soutenir cette initiative de toutes nos forces. Au fait, on n’entend guère les évêques de “l’Eglise qui est en France”…

  2. autrefois la gauche était pour cosette contre les ténardier, aujourd’hui ils sont pour la vente de bébé et la location de l’utérus d’une pauvresse

  3. Mais il faut criminaliser toute forme de GPA, or ce n’est pas ce que dit le parlement européen seulement celle qui est forcée. Il faut criminaliser tous ceux qui exploitent ces femmes avec de très lourdes peines 10 ans minimum et ceux qui en sont les clients, mêmes peines

    • D’accord avec Gaudete sur ce point.
      Ce n’est que l’exploitation de la gestation pour autrui qui est condamnée et non la GPA elle-même. C’est un bon début mais il faut aller plus loin puisque notre législation accorde la nationalité française à l’enfant conçu d’une GPA à l’étranger. C’est donc un encouragement à frauder la loi nationale.

    • Et que l’on ne nous parle pas de l’intérêt de l’enfant à naître qui est si souvent nié et oublié quand on évoque l’avortement.

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