Partager cet article

Pays : Espagne

Espagne : “La transition démocratique vient du franquisme et non pas de la gauche”

Espagne : “La transition démocratique vient du franquisme et non pas de la gauche”

Nous avions évoqué l’important ouvrage de l’historien espagnol Pio Moa sur la guerre d’Espagne. Il vient d’être interrogé dans la revue de Chrétienté Solidarité, Reconquête, sur l’actualité espagnole :

Comment en est-on arrivé à ce que l’Espagne risque aujourd’hui l’éclatement par la possible partition de la Catalogne, voire du Pays Basque ?

En 1978, l’Espagne a approuvé une nouvelle constitution, au moment de la transition dite démocratique, après la mort du général Franco en novembre 1975. Mais lorsque les socialistes sont parvenus au pouvoir en 1982, après la gouvernance d’Adolfo Suarez qui était un centriste démocrate-chrétien, Alfonse Guerra, qui fut Vice-Président du PSOE a annoncé que « Montesquieu c’était fini – que c’en était fini de la séparation des pouvoirs ». Depuis, l’Espagne est dans la confusion des pouvoirs, le pouvoir judiciaire étant totalement inféodé au pouvoir politique.

Pourtant la constitution de 1978 apportait une ère nouvelle?

En réalité il faut bien comprendre un point fondamental que je développe dans nombre de mes livres. La transition démocratique vient du franquisme et non pas de la gauche. C’est le parlement franquiste qui a organisé et le référendum de 1976 et la création des nouvelles institutions, car Franco avait prévu qu’après sa mort, la monarchie reviendrait en Espagne, et il avait tout organisé pour cela.

Un homme fut déterminant à cet égard, c’est Torcuato Fernàndez-Miranda. Il était professeur de droit constitutionnel et fut ministre entre 1973 et 1974, secrétaire du Mouvement, le parti franquiste. Il fut nommé Président des Cortès, et Président du Conseil du Royaume de 1975 à 1977. Il fut le professeur de droit de Juan Carlos et joua un rôle considérable durant la Transition démocratique. Donc les gauches ont été totalement étrangères à la Transition démocratique, ce qu’elles ne peuvent plus accepter.

Pourquoi le PP et Vox n’ont-ils pas obtenu le 23 juillet dernier la majorité absolue que tous leur prédisaient ?

Il faut bien appréhender le fait que Vox s’est constitué contre le PP, ce sont des cadres qui ont quitté le PP qui ont créé Vox. Ce sont en quelque sorte des frères ennemis. Au cours de cette campagne électorale, le PP s’est principalement attaqué à Vox, pensant qu’en le réduisant il gonflerait son propre score. Mais le PP lorsqu’il gouvernait a favorisé les séparatismes, il ne s’est jamais attaqué aux lois mémorielles où sociétales des gauches. Vox n’a pas fait non plus une bonne campagne, car à mon sens, il ne s’est pas assez distancié du PP. Je le répète, du franquisme vient la démocratie, la transition. Or le PP depuis Aznar ne veut plus le reconnaître, et pense que tout cela provient de la gauche. En 2002, le PP a condamné le franquisme, le soulèvement salvateur des 17 et 18 juillet 1936. Adolfo Suarez devait tout à Torcuato Fernàndez-Miranda, mais le PP l’a complètement « oublié ».

Pourtant le PP et Vox se sont alliés pour gouverner ensemble dans plusieurs régions et municipalités suite à leurs victoires électorales du 28 mai dernier lors des régionales et municipales?

Oui, mais les dirigeants du PP attaquent Vox tout le temps, même dans ces régions qu’ils sont censés gouverner ensemble. Sauf en Castille et Leon et dans le pays valencien, où là les choses se passent plutôt bien entre eux. Mais Vox ne réplique pas assez fortement à mon sens.

Et Madame Isabel Dias Ayuso du PP, qui dirige avec poigne la Communauté du Grand Madrid ?

Cette dernière attaque clairement le PSOE et son idéologie, elle n’a pas besoin de Vox, car elle dispose d’une majorité absolue dans sa Communauté. Elle est très libérale, très pro économie de marché. Mais je reviens sur le Franquisme. Ce dernier était divisé en plusieurs tendances, les monarchistes, les carlistes, les catholiques, les phalangistes. Toutes ces tendances avaient le catholicisme comme soubassement. Avant la mort de Franco, ces quatre tendances se sont divisées. Puis l’Eglise a appuyé les séparatismes, les socialistes, etc. Par exemple, Feijoo qui a long- temps dirigé la Galice, a approuvé la politique indépendantiste de cette région, il a eu un rôle à contre-emploi. Il est très difficile par conséquent aujourd’hui pour lui de faire machine arrière devant les menaces du séparatisme basque et catalan. (Je rappelle que Luis Pio Moa est galicien d’origine, natif de Vigonda).

Comment ces politiques clairement séparatistes Catalanes et Basques ont-elles ressurgi ?

Au début, en 1978, les statuts de larges autonomies données aux régions leurs convenaient. On leur a d’ailleurs beaucoup trop donné, beaucoup plus que ce qu’elles demandaient à l’époque. Tout était alors dirigé par des démocrates-chrétiens, le gouvernement d’Adolfo Suarez, les dirigeants catalans de l’époque, et l’Eglise devenue démocrate-chrétienne a joué un rôle considérable. (Je précise que les statuts d’autonomie actuels fixés par la Constitution vont très loin).

Que va-t-il arriver? Où va l’Espagne depuis l’organisation en 2017 par les séparatistes catalans de ce fameux référendum?

Le pays est considérablement divisé. La situation politique est très tendue. Nous sommes très loin de la réconciliation nationale des années 1976/1978. Le Roi n’a pas défendu la Constitution, alors qu’il avait les moyens constitutionnels de le faire. Les Catalans ont provoqué un coup d’état constitutionnel en 2017, avec ce référendum illégal, car anticonstitutionnel. Les gauches ont tout fait pour monter les Espagnols les uns contre les autres, par diverses lois mémorielles et sociétales. Je suis très pessimiste pour l’avenir de mon pays.

En cette fin octobre, début novembre 2023, alors que suite à l’échec d’investiture pour 4 voix seulement d’Alberto Nuñez Feijoo du PP, soutenu par Vox, qui a démontré que l’intérêt de l’Espagne était au-dessus des partis, c’est Pedro Sanchez du PSOE qui a reçu mandat du Roi de solliciter l’investiture des Cortès. Il va tout faire pour obtenir le feu vert des indépendantistes catalans du Parti Junts, soit 7 députés, en leur accordant et l’amnistie de leurs forfaitures, et l’organisation d’un nouveau référendum sur l’indépendance de la Catalogne ; sans ces 7 voix, il ne pourrait pas atteindre la majorité. Depuis quelques semaines, dans plusieurs villes d’Espagne, à Madrid mais aussi dans d’autres capitales régionales, comme Malaga ou Valence, des manifestations populaires soutenues par de nombreux jeunes se produisent contre l’amnistie et contre le référendum, et connaissent un franc succès. Toutes les semaines des manifestations se font jour. L’Espagne est effectivement plus divisée que jamais. De nombreux manifestants hostiles à la politique voulue par Pedro Sanchez se réunissent souvent devant les sièges locaux du PSOE. Un fait m’a marqué, la jeunesse de ces très nombreux opposants, est-ce un signe d’espoir?

Partager cet article

1 commentaire

  1. lisez le livre de Pio Moa sur la guerre d’Espagne, vous aurez une idée du PSOE ! vous n’en attendrez pas grand chose…

Publier une réponse

Nous utilisons des cookies pour vous offrir la meilleure expérience en ligne. En acceptant, vous acceptez l'utilisation de cookies conformément à notre politique de confidentialité des cookies.

Paramètres de confidentialité sauvegardés !
Paramètres de confidentialité

Lorsque vous visitez un site Web, il peut stocker ou récupérer des informations sur votre navigateur, principalement sous la forme de cookies. Contrôlez vos services de cookies personnels ici.


Le Salon Beige a choisi de n'afficher uniquement de la publicité à des sites partenaires !

Refuser tous les services
Accepter tous les services